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Le SEO est mort, vive ChatGPT et les réseaux sociaux ?

ChatGPT et les autres nouveaux outils d'intelligence artificielle signent-ils la fin du référencement tel qu'on le connaît ?


Janvier 2023 : je découvre une publication étonnante de Cédric Quéniart, fondateur de Content pour vous et spécialiste en stratégie et création de contenus. Selon lui, le marketing est en train de prendre un tournant, parce que ChatGPT est en train de précipiter la fin du SEO tel qu'on le connaît. Et pour lui, c'est une bonne nouvelle. Vu que je m'intéressais déjà sur la question, notamment sur l'importance du référencement naturel, j'ai décidé de l'interviewer pour en savoir plus. Et tant qu'à faire, il m'a aussi parlé de chatons, de charentaises, de pare-brise et de stylos Bic. Un chic garçon à écouter sans modération.

 

Si vous n'avez que 30 secondes parce que vous devez tirer la chasse d'eau :


 

Le SEO est surestimé par les marketeurs

Souvent par manque d'investissement dans une stratégie omnicanale, meilleure façon d'ancrer la marque dans les esprits.

Sur certaines requêtes, il est quasiment impossible de lutter en organique

Même la longue traîne commence à être saturée, il y a très peu de place pour des nouveaux contenus, et de toutes façons, l'IA va court-circuiter tout ça.

Trop souvent, les entreprises envisagent le contenu uniquement sous l'angle du SEO 

Alors qu'il existe d'autres façons de mettre son contenu sous le nez de ses clients cibles. Notamment construire une communauté sur les réseaux sociaux.

La fin du SEO tel qu'on le connaît est une opportunité

De se fonder sur les besoins de ses publics et de créer de la conversation sur un mix de canaux.

"Le SEO est surestimé par les marketeurs"

Tu affirmes que le SEO est surestimé par les marketeurs. Est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi ?

Cédric Quéniart, fondateur de Content Marketing ManagerContent Marketing Manager Content Pour VousGoogle a déjà largement entamé sa mutation en moteur de réponses, et ça limite de fait la visibilité des résultats organiques - ceux qui ne sont pas de la publicité. L'émergence de "Chaton" pourrait amplifier la tendance. D'une part, les logiciels d'attribution attribuent au SEO une part importante de visites qui viennent en réalité d'autres canaux qu'ils ne peuvent ou ne savent pas tracker correctement : réseaux sociaux, bouche-à-oreille, communautés, podcasts. D'autre part, beaucoup d'entreprises affirment que le SEO est leur principal point d'entrée... parce qu'elles sont inactives ou inconsistantes sur les autres canaux.

Bien d'accord, même s'il s'agit parfois d'une stratégie : surtout si l'achat est actif et compulsif et que c'est quasi toujours une recherche Google qui démarre le process. Et sinon, "Chaton", on en parle ?

Chaton, c'est mon petit surnom affectueux pour ChatGPT. Tu as raison Karoline, mais plutôt dans un contexte B2C. Par exemple, j'ai froid aux pieds, je décide de m'acheter une paire de charentaises, je vais sur Google, je regarde les premiers résultats de recherche, je vais sur le site et j'achète. Cela dit, si vous êtes la marque "top of mind" sur le marché des charentaises, l'internaute va plutôt faire une recherche marque qu'une recherche produit. L'exemple typique, c'est Carglass. Qui tape "réparation de pare-brise" ? Ceci dit, par déformation professionnelle j'ai tendance à raisonner plutôt sur des cycles B2B un poil plus complexes.

Donc, tu disais que ChatGPT allait encore accentuer la transition des moteurs de recherche en moteurs de réponse ?

C'est déjà bien entamé chez Google. 65% des recherches n'aboutissent pas à un clic parce que l'internaute trouve sa réponse sur Google. Avec ChatGPT, tu obtiens directement une réponse à ta question. Si Bing (c'est dans les tuyaux) injecte les réponses de ChatGPT dans son moteur de recherche, et si les autres suivent la tendance, nous aurions les réponses générées par IA, les résultats payants... et quelle place pour les résultats organiques sur la SERP ? [page de réponses]

Tu dis que 65% des recherches n'aboutissent pas à un clic parce que l'internaute trouve sa réponse sur Google. Je ne connaissais pas ce chiffre. Du coup je me demande comment on fait pour convertir dans ce contexte.

C'est bien le sujet. Eh bien, on fait en sorte que les internautes n'aient pas besoin de faire une recherche Google pour arriver jusqu'à nous. On utilise les autres canaux de génération de demande pour booster la notoriété de sa marque, ce qui permet de générer du trafic direct sur son site ou des "recherches marque" sur les moteurs, comme je le disais au sujet de "Carglass" au lieu de "réparation de pare-brise".

Donc si je comprends bien on sera sur un SEO axé notoriété, avec seulement l'URL du site, et pour le reste on se tourne vers les contenu sur les réseaux sociaux.

On peut bien sûr continuer à produire des contenus experts optimisés SEO, mais il faudra qu'ils soient très pointus et portent une vision singulière, différenciante. Mettre le paquet sur les canaux de notoriété en amont aura aussi un rôle positif sur ton CTR [taux de clics] dans la SERP. Si tu dois choisir entre plusieurs résultats, tu auras tendance à cliquer sur le lien qui pointe vers le site d'une marque que tu connais déjà et dont tu as apprécié les contenus sur d'autres canaux. Pour le dire autrement, la notoriété, le fait d'être connu d'avance, a un effet démultiplicateur sur tous les autres canaux.

"Sur certaines requêtes, il est impossible de lutter en organique"

Qu'est-ce que qui te fait dire ça ?

Je dis en effet que sur certaines requêtes, il est déjà quasi impossible de lutter en organique, en l'occurrence contre des agrégateurs de solutions ou contre des concurrents solidement établis. Et même la longue traîne commence à être saturée. Ça va de pair avec l'avènement du "social buyer", qui fait une partie de son parcours sur les réseaux sociaux. C'est là qu'il prend conscience de son problème et commence à "mâchouiller" son besoin avant d'aller vers les solutions. Dans la même logique, il va préférer écouter les avis de ses pairs, lire des synthèses d'experts, écouter des podcasts... et consulter des avis avant d'aller vers une marque ou une autre.

Pourquoi ça selon toi ?

Il consulte des avis parce qu'il considère qu'ils sont impartiaux, alors que la marque va de toute façon essayer de lui vendre sa solution. Donc les sites d'avis, les comparateurs prennent les premières positions SEO sur les requêtes business. Si, en plus, tu as des concurrents déjà très bien établis, la course aux premières positions est un combat perdu d'avance. Et ce sera encore plus compliqué si les moteurs de recherche intègrent les résultats IA. Ajoute à cela le volume stratosphérique de contenus existants. Sur certaines thématiques, l'espace est tout simplement saturé.

Tu veux dire saturé sur le plan qualité et pertinence du contenu ?

Oui, exactement. D'ailleurs, même Google avait constaté que, sur un certain nombre de requêtes, il y a très peu de place pour de nouveaux contenus. C'est pourquoi la "fraîcheur" du contenu est devenue un critère. Mais il suffit alors de mettre régulièrement à jour les contenus un peu datés pour conserver des positions établies.

Penses-tu qu'il n'existe plus beaucoup de place à prendre sur des articles exploitant les failles des SERP, c'est-à-dire la différence entre le besoin du requêteur et les réponses du moteur ? 

En théorie, oui, on peut se positionner en remplissant les gaps entre besoin de l'internaute et résultats des SERP. Mais sur des sujets bien saturés, les gains me semblent marginaux. Il faut que les contenus soient plus qu'excellents et le résultat reste aléatoire tant les pages placées dans les premières positions ont de backlinks et un contenu déjà très bon et actualisé.

Est-ce que du coup la recherche de backlinks devra faire partie intégrante des compétences des rédacteurs ?

La recherche de backlinks est un artifice. C'est très fastidieux, et puis aller chercher des sites référents qui vont se lier à nos pages pour des raisons plus ou moins louables, je ne trouve pas ça très vertueux. Quand c'est bien fait, avec des guest posts ou des interviews qui apportent de la valeur, pourquoi pas ? Dans tous les cas, c'est très chronophage. Il me semble plus judicieux de consacrer son temps et son énergie à aller toucher ses publics sur d'autres canaux. Par exemple, avoir une activité régulière sur les réseaux, avec des publications mais aussi des commentaires, lancer un podcast, animer des lives, des webinars... Créer et animer une communauté.

"Trop souvent, les entreprises envisagent le contenu uniquement sous l'angle du SEO alors qu'il existe d'autres façons de mettre son contenu sous le nez de ses clients cibles"

Tu disais "être connu d'avance", en gros.

L'idée est d'être dans la tête de ses publics avant même qu'ils n'en soient au stade de la recherche Google ou, dit autrement "être connu d'avance". Ainsi, la marque est associée à son marché. Si on me dit stylo, je pense "Bic". Si on me dit "réparation de pare-brise", je pense "Carglass". Je suis convaincu que c'est réplicable en B2B. En plus, en faisant cela, tu gagnes aussi des mentions et des backlinks, par exemple quand ta notoriété acquise fait qu'on t'invite à t'exprimer sur un sujet, à être invité sur un autre podcast... Et varier les canaux te prémunit aussi contre des variations brutales d'algorithmes. Donc il existe d'autres façons de mettre son contenu sous le nez de ses publics que produire des articles SEO 😉

Donc, si je comprends bien, l'importance de la construction d'une communauté, du travail autour de la notoriété et de l'autorité est en train de prendre une ampleur sans précédent. 

Oui, tu comprends bien, le travail sur la marque agit comme un carburant puissant qui vient alimenter les leviers d'acquisition. Il joue sur le rôle de coefficient multiplicateur. Si on prend l'inbound marketing, par exemple, beaucoup d'entreprises échouent car elles ne misent que sur l'expertise. On fait des articles SEO, des contenus experts, des ebooks... mais si on ne travaille pas en amont sur la marque, la notoriété et l'incarnation de la marque, on va se planter quand même.

 

 

 

Est-ce que ça signifie que le rédacteur web doit se concentrer sur les réseaux, au point de laisser tomber le blog ? Est-ce que ton "chaton" ne va pas finalement précipiter les réseaux sociaux dans la chute du contenu généré par des humains ? 

Non, on ne laisse pas tomber le blog, mais il faut l'envisager en complémentarité avec d'autres canaux, notamment dans une logique de recyclage de contenus.  Sur les réseaux, je pense que c'est l'incarnation qui va primer avec des formats "sensoriels" comme le live, la vidéo et le podcast.

Quels types de rédacteurs vont pouvoir survivre à cette déferlante ?

Les rédacteurs qui vont surnager seront ceux qui combinent expertise et capacité à créer une connexion émotionnelle avec les publics de la marque. Autrement dit, il faut s'attendre à la mort du rédacteur SEO, orienté technique, et à la gloire du rédacteur éditorialiste, capable d'insuffler de l'émotion et de défendre un point de vue singulier.

"La fin du SEO tel qu'on le connaît est une opportunité de se fonder sur les besoins de ses publics et de créer de la conversation sur un mix de canaux"

... Plutôt que de s'obstiner à produire des monologues filtrés par des robots.

Cédric, une dernière question, et ce sera le mot de la fin : est-ce que tout ça veut dire qu'il faut complètement arrêter le SEO ?

Non, il ne faut pas arrêter le SEO. Mais je suis convaincu qu'il ne faut plus autant compter sur lui que par le passé et rééquilibrer ce que j'appelle le "content mix", le mix de canaux et de formats sur lesquels on s'adresse à ses publics.

 

On pose ça là.

 

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